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L'ambidextrie des chrétiens

Bonjour à tous,


Et bonne rentrée masquée à chacun!


J'espère que vous avez passé un bon été, plein de retrouvailles et de gestes sanitaires.


Pendant ces deux derniers mois nous avons réalisé une lecture suivie du texte de Molinié, "du trou noir à la fontaine blanche". C'est un texte assez dense. J'avais préparé un petit résumé pour clôturer ce chapitre, mais obnubilé par les vacances j'ai omis mes devoirs. Coiffé d'un affreux bonnet d'âne, je vous propose donc sans transition un nouveau thème, moins éthéré je vous rassure tout de suite. N'ayez pas peur, comme qui dirait. Allez, hop.


"L'option GKC", part d'un élan, celui de puiser dans l'encre de nos aïeux la sagesse indispensable pour vivre en chrétiens dans le monde actuel. Sans omettre la première sagesse essentielle contenue dans la parole de Dieu, nous nous mettons à l'écoute des anciens qui ont des tas de choses à nous dire. D'ailleurs si vous avez des textes de ce genre, envoyez-les-moi!


J'ai récemment découvert un livre, couronné par l'académie française s'il vous plait, d'Alec Mellor: "histoire de l'anticléricalisme français". C'est un document des plus instructif, qui retrace la relation entre l'Eglise et l'état français. Ça en dit long sur notre pays, et même si la position de l'auteur est légèrement ambiguë on apprend tout plein de choses (un extrait est prévu pour les prochaines semaines). L'auteur conclue sur le nouvel anticléricalisme (il écrit en 1978, alors "nouveau" c'est relatif, hein): l'anticléricalisme marxiste.


Il m'a donc semblé intéressant d'observer la lutte entre le marxisme et l'Eglise dans ces années-là. Je parle au passé mais c'est surtout intéressant parce que c'est pas complètement révolu tout ça.


C'est là que la CFTC entre en scène. Syndicat chrétien créé en 1920, la CFTC est après-guerre et pendant 30 ans le champ de bataille entre marxisme et doctrine sociale chrétienne. Cette guerre nous a donné de vrais pépites, à travers le témoignage de chrétiens engagés dans la société moderne. C'était l'époque de nos parents, aurions-nous autant de courage aujourd'hui?


Alors voici pour commencer quelques passages d'un article de André Mondou, intitulé "Gauche? Droite? Nous refusons de marcher au pas cadencé", cité dans le livre "la CFTC, comment fut maintenu le syndicalisme chrétien" de Jacques Tessier:


"Si la gauche est synonyme d'une volonté de progrès social authentique et durable, alors nous sommes de gauche. Mais si elle se caractérise par un flot de promesses démagogiques et illusoires, ne tenant aucun compte des possibilités économiques de les réaliser, alors nous sommes contre.


"Si la droite incarne le souci de défendre la stabilité monétaire, à défaut de laquelle le sort des humbles ne peut que s'aggraver sans cesse, nous en sommes. Mais si elle est le symbole du conservatisme d'intérêts égoïstes, de la consolidation des injustices, ou, a fortiori, de la volonté de reprendre aux travailleurs les avantages légitimes qu'ils ont conquis, nous n'en sommes plus.


"Si la gauche traduit une aspiration sincère mais réaliste vers la paix, nous sommes de gauche. Si, en revanche, elle se présente comme un pacifisme inconsidéré, négligeant l'existence d'une redoutable dictature qui, ayant déjà annexé par les armes cent millions d'êtres humains, n'a nullement renoncé à son ambition d'impérialisme mondial, nous ne pouvons accepter d'en être.


"Si la droite signifie: volonté de préserver ou de restaurer les valeurs spirituelles et morales qui ont forgé notre civilisation occidentale et constituent le fondement d'une société prospère, nous sommes de droite. Mais si elle veut dire: restauration d'un passé révolu ou culte d'un nationalisme chauvin générateur de conflits armés entre les peuples, alors nous sommes contre.


"Si la gauche concrétise une conception matérialiste et simpliste selon laquelle il suffit d'étatiser l'économie pour que le problème social soit résolu et les aspirations des travailleurs satisfaites, nous n'en sommes pas. Mais si elle désigne ceux qui, au moyen d'un ensemble d'institutions largement décentralisées, "à échelle humaine", veulent instaurer une authentique démocratie économique, seule susceptible de répondre à la fois aux aspirations matérielles et aux aspirations morales des travailleurs, nous sommes de cette gauche-là.


"Si la droite est à la dévotion d'un patronat "de droit divin" et n'a d'autre idéal social qu'un anticommunisme purement négatif tendant à éliminer l'une des forces qui combattent l'injustice, évidemment nous sommes contre. Mais si elle est la volonté de défendre et de consolider les libertés, y compris celle, pour les pères et mères de famille, de faire donner à leurs enfants l'éducation de leur choix, assurément nous sommes de droite.


"Pour la même raison, nous sommes contre la gauche si elle nie les droits de la famille, et si elle conçoit la laïcité de l'État sous une forme aboutissant à faire de l'éducation religieuse un privilège des riches, aggravant ainsi dangereusement les fossés entre classes sociales. Mais nous sommes résolument pour la gauche si elle entend barrer efficacement la route au communisme en édifiant un nouvel ordre social fondé sur la justice et sur la liberté, et conférant aux travailleurs de même qualification un niveau de vie égal, quelles que soient leurs charges de famille.


"Nous sommes contre la droite si ses plaidoyers en faveur de la "libre entreprise" dissimulent une volonté de maintenir le monopole du pouvoir et de la puissance économique aux mains d'une caste privilégiée. Mais nous sommes pour la droite dans la mesure où elle admet la nécessité, en excluant un dirigisme tatillon, inutile et paralysant, de soumettre l'activité des entreprises à une orientation économique générale des pouvoirs publics, tendant à rendre plus équitable la répartition des richesses entre les diverses catégories sociales.


"Nous récusons toute classification a priori, car elle n'aurait pour but que de favoriser des visées de certains hommes ou de certains clans politiques. Dans le domaine économique et social, comme en beaucoup d'autres, la vérité se situe dans un juste milieu: toute la vérité n'est pas d'un seul côté tandis que l'autre serait intégralement dans l'erreur, ce serait trop simple! Un minimum d'objectivité - qualité rarissime, hélas! Chez les Français - oblige à reconnaitre qu'il y a du vrai et du faux de part et d'autre. Dans la mesure où notre syndicalisme chrétien ambitionne de servir la véritable justice et la véritable liberté, il est donc et doit demeurer inclassable d'après les critères exclusivement politiques.


"Nous ne saurions accepter, comme on voudrait nous le suggérer parfois, de prendre les vessies pour des lanternes... Nous refusons de marcher au pas cadencé. Tant pis si cela dérange les plans de certains stratèges politiques ou fait grogner certains adjudants!"


Article paru dans le deuxième bulletin des équipes syndicales chrétiennes, en 1956 environ. Le rapport Khrouchtchev, qui détaille les atrocités commises par Staline, est gardé secret jusqu'en 1980 et le communisme est encore synonyme d'espoir pour beaucoup de personnes...

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